Aéronautique : les futurs ingénieurs de l’association IPS’Airship croient au retour en force du dirigeable !
D’abord simple équipe d’étudiants de l’IPSA constituée pour participer à la première édition du Float Lift & Fly Contest en 2020, l’association IPS’Airship a vu officiellement le jour un an plus tard sur le campus parisien de l’école afin de permettre à ses membres de travailler sur le renouveau du dirigeable. Un pari gonflé, mais pas irréaliste pour les futurs ingénieurs, tant ce mode de transport longtemps disparu des radars semble désormais promis à un réel retour en grâce.
« Dans l’aéronautique, on pense d’abord à l’avion, à l’hélicoptère et aux drones, mais pas tellement au dirigeable alors qu’il permet justement de changer de point de vue : il peut accomplir des missions très particulières et représente une technologie prête à revenir sur le devant de la scène. » À l’écouter parler du sujet ; on se dit que Jean-Damien Ronzel (IPSA promo 2026), l’actuel président d’IPS’Airship, est un passionné de la première heure de ce moyen de locomotion aérien. Sauf que la réalité est toute autre. « Quand j’ai intégré l’IPSA, j’avais plutôt un profil orienté vers le spatial, avoue le principal intéressé. En fait, j’ai redécouvert le dirigeable un peu par hasard via l’association et c’est vraiment devenu une passion. Aujourd’hui d’ailleurs, j’avoue regarder de plus près le secteur et commence à m’y projeter pour mon futur professionnel ! »
Le dirigeable, un moyen de transport durable et à réinventer
Si Jean-Damien s’épanouit dans cet univers, c’est que ces « géants des cieux » disposent de solides arguments capables de séduire les nouvelles générations d’ingénieurs, à l’image de leurs promesses face à la crise climatique actuelle. « C’est un moyen de transport qu’on peut penser durable à l’heure où, dans l’aéronautique, on parle énormément de technologies vertes et de la décarbonation de l’aviation comme objectif », juge l’étudiant. Longtemps mis de côté par les acteurs du ciel, le dirigeable a également appris de ses erreurs pour se défaire de ces images de crashs et d’accidents souvent mortels ayant parsemé son passé lointain. « Le gaz utilisé n’est ainsi plus le même qu’auparavant, passant de l’hydrogène à l’hélium, non inflammable. Au niveau de la propulsion aussi, il y a des avancées intéressantes avec une propulsion électrique et donc thermique permettant plein de micro améliorations. En fait, on essaye le plus possible d’appliquer les technologies actuelles – notamment de l’électronique – au dirigeable pour le complexifier et surtout compenser la très longue absence de développement sur ce moyen de transport au détriment des autres moyens de transports. »
L’entrain de l’étudiant ne ment pas : le dirigeable a tout d’un véritable terrain de jeu pour ingénieurs. « C’est un aéronef qu’il faut remettre au goût du jour, avec l’apport de moteurs plus performants et électriques – même si l’on utilise encore des générateurs à base de kérosène et qu’il faut en prévoir quelques tonnes à brûler par vol pour faire cette génération électrique, précise Jean-Damien. En parallèle, il y a également un autre défi au niveau des certifications : aujourd’hui, en raison de son passé, il existe vraiment très peu de certifications dans le monde pour le dirigeable auprès de l’European Union Aviation Safety Agency (EASA) ou de la Federal Aviation Administration (FAA) par exemple. Que ce soit pour la R&D ou la partie réglementaire, il y a plein de choses à faire et à découvrir. C’est un domaine véritablement passionnant ! »
Utiliser le dirigeable pour des missions spécifiques
Le dirigeable peut surtout représenter une alternative crédible aux véhicules existants afin d’effectuer des missions annexes complémentaires, comme le transport de charges lourdes sur de longues distances. « Le cas des éoliennes qu’on installe de plus en plus pour favoriser l’émergence des énergies vertes est un bon exemple, estime le président d’IPS’Airship. En effet, pour transporter ces éoliennes afin de les installer, deux solutions existent actuellement : le camion ou l’hélicoptère. Or, pour qu’un camion transporte une pale d’éolienne, il faut couper des arbres sur le chemin, bloquer des routes, etc. C’est assez compliqué, prend beaucoup de temps et coûte beaucoup d’argent. En hélicoptère, le problème est autre : on n’a pas une portance infinie, c’est-à-dire que cela commence à devenir compliqué au-delà de 10/15 tonnes à devoir transporter. » D’où l’intérêt du dirigeable dans ce cas de figure, avec des modèles pouvant soulever 60 tonnes sans impacter l’environnement.
Float Lift & Fly Contest : le concours étudiant du dirigeable !
Parmi les nombreuses entreprises et startups ayant choisi de redorer le blason du dirigeable se trouve notamment la française Flying Whales, justement à l’origine du Float Lift & Fly Contest et, par ricochet, de la vocation de plusieurs membres d’IPS’Airship. « L’association a été créée pour préparer de futures participations au concours, obtenir des financements et faire découvrir le monde dirigeable aux étudiants de l’école, rappelle Jean-Damien. Découvrir un moyen de transport qu’on ne voit pas forcément en cours, c’est super intéressant et cela l’est encore plus quand on sait que le dirigeable permet de toucher un peu à tout : structure, électronique, informatique… Au sein de l’association, il y a de la création, de la recherche et c’est assez complémentaire ! »
Les 9 et 10 juillet 2023 à l’Arkéa Arena de Bordeaux, IPS’Airship participait donc une nouvelle fois à la finale du concours Float Lift & Fly Contest. Comme l’an dernier, l’équipe de l’association IPSAlienne a réussi une belle performance en atterrissant sur la deuxième marche du podium. « Pour le concours, toutes les équipes participantes disposent de la même enveloppe, c’est-à-dire la partie du dirigeable que l’on remplit de gaz, mais chacune ajoute ensuite ses éléments un par un en étant libre de faire ce qu’elle veut pour répondre à l’objectif, détaille le finaliste dont il s’agissait de la deuxième participation consécutive. Cette année, le principe consistait à concevoir un dirigeable capable d’aller transporter des grumes – de petites bûchettes de bois – sur un parcours donné. Nous pouvions alors imaginer ce que l’on souhaitait, du système de propulsion au système de ballastage. » Pour IPS’Airship, cela donne un « beau bébé » de 7 m de long sur 1m50 de diamètre. Un véhicule impressionnant même si ses dimensions sont encore loin d’atteindre celles du modèle de l’entreprise Flying Whales, avec ses 200 m de long et ses 50 m de diamètre.
Si chaque équipe engagée au sein du concours propose un dirigeable unique, certaines normes se dessinent au fil des participations successives, comme le fait d’utiliser quatre moteurs sur les côtés afin d’offrir une meilleure navigation. « Il y a toutefois des nuances, note Jean-Damien. Nous, par exemple, cela fait deux ans qu’on a opté pour une navigation à 6 moteurs, dont 4 sur les côtés et deux en dessous de l’aéronef. Cette année, l’équipe lauréate a choisi de rajouter un moteur au-dessus et en dessous. Chaque approche est finalement unique, ce qui rend le concours encore plus intéressant. »
IPS’Airship plus que motivée pour continuer à façonner le dirigeable de demain !
Pour le futur ingénieur, cette deuxième place obtenue en 2023 s’explique d’abord par la capacité de transmission au sein de l’association entre l’équipe de l’an dernier et celle de cette année. « On a davantage pu échanger nos connaissances sur le concours, apprendre de nos erreurs très vite, réaliser des phases de test plus rapides, mais aussi s’appuyer sur un système de navigation existant ainsi que des systèmes de ballast que l’on avait imaginés l’an passé sans avoir eu le temps alors de les mettre en place, analyse le président, très optimiste pour la suite. Un dirigeable ne se pilote pas du tout comme un drone ou un avion : il a une inertie particulière. Or, dans le cadre du concours, on a eu seulement 24 h pour apprendre à le contrôler, ce qui reste peu. Cela nous donne toutefois de l’espoir pour l’an prochain : on pourra tenter d’aller chercher la première place ! C’est notre objectif chaque année, bien sûr, mais avec le gain d’expérience et notre motivation, cela le sera encore plus ! »
D’ailleurs, être motivé est la première condition pour intégrer l’association IPS’Airship. « La motivation, c’est 80 % du travail, assure son président. Moi par exemple, je suis arrivé dans l’association avec uniquement quelques compétences en informatique. Le reste, je l’ai appris sur le tas, en ne baissant jamais les bras : il faut foncer et, aussi, être un peu fou car, quand ça ne marche pas, on doit toujours trouver la force pour continuer à chercher une solution. » Une belle définition de l’ingénierie, finalement !